10 Mai Comment adapter son alimentation et se motiver quand on arrête de fumer ?
Vous souhaitez arrêter de fumer ? Super, c’est une excellente décision pour votre santé ! Le sevrage tabagique n’est pas chose facile, mais on arrive à s’en sortir avec de la patience, de la bienveillance envers soi, des bons conseils et du soutien. Car vous n’êtes pas seul.e. En France, il y a près de 16 millions de fumeurs !
Pourquoi peut-on grossir quand on arrête de fumer ? Comment adapter son alimentation lors de l’arrêt du tabac afin de ne pas prendre de poids ? Retrouvez mes conseils et ceux du Dr Délia Cozzolino médecin généraliste-addictologue qui officie dans le pôle santé de Bois-Colombes, pour mettre toutes les chances de votre côté lors de votre transition vers une vie sans tabac !
Pourquoi on est accro au tabac ?
Le tabac est une addiction qui implique une dépendance à plusieurs niveaux :
- Physique
- Psychique
- Comportementale/environnementale
La nicotine vous rend accro et lorsque vous la supprimez, vous ressentez les symptômes du manque. La cigarette est mentalement associée à un moment de plaisir : pendant la pause, après un moment de stress. Elle est aussi intimement liée à des circonstances (fêtes, apéros, café), des lieux, mais également des personnes.
L’arrêt du tabac fait grossir : vrai ou faux ?
Lorsque vous vous en grillez une, vous brûlez des calories. En arrêtant de fumer, votre métabolisme va donc ralentir. En d’autres termes, le brûlage des calories réduit.
Aussi, le plaisir procuré par la cigarette est souvent remplacé par d’autres sources de plaisir immédiates comme des aliments “doudou”, en général sucrées ou salées. Il est donc recommandé d’augmenter sa pratique sportive ou de se mettre à une activité physique pour compenser le brûlage des calories.
Donc grâce à de bonnes habitudes alimentaires et un peu de sport, la prise de poids n’est pas inéluctable !
On mange quoi quand on arrête de fumer ?
Deux neuromédiateurs sont impliqués dans le sevrage : la dopamine ou hormone du plaisir stimulée par la nicotine, et la sérotonine, l’hormone de la sérénité liée à la nécessité de fumer lorsque vous êtes stressé.e.
Il faut donc trouver d’autres moyens de stimuler ces deux hormones, grâce à l’alimentation, au sport et à une bonne hygiène de vie.
Quels aliments manger lors d’un sevrage tabagique ?
- Aliments riches en fer et en magnésium. Ils contribuent à la synthèse de la dopamine et sérotonine. Le magnésium est quant à lui un régulateur d’humeur.
- Acides gras Oméga 3 de type DHA. Retrouvez-les dans les poissons gras de type harengs ou maquereaux, l’huile de noix ou de colza…
- Tisanes à base de mucuna, griffonia, aubépine, passiflore et valériane pour apaiser votre humeur.
- Antioxydants, et plus particulièrement des fruits et des légumes.
- Légumineuses de type lentilles, pois chiches, haricots.
- Protéines le matin pour activer la dopamine.
- Fruit ou un laitage en fin de journée pour la sérotonine.
Arrêt de la cigarette : quelles bonnes habitudes prendre ?
Faites du sport ! Pratiquez une activité physique pour compenser le ralentissement de votre métabolisme, réduire l’anxiété ou le stress et… penser à autre chose !
Limitez votre consommation de sucres rapides et évitez les aliments ultra-transformés.
Respirez et méditez ! Prenez quelques minutes plusieurs fois par jour pour quelques exercices de respiration profonde.
Et à l’heure de l’apéro, on fait comment ? Les premiers jours, il est recommandé d’éviter les événements associés à la cigarette comme les apéros. L’alcool n’est pas votre meilleure amie lorsque vous arrêtez de fumer. Privilégiez le vin rouge plutôt que les alcools forts ou la bière. Pourquoi ? Parce que le vin est riche en polyphénols qui ont des propriétés antioxydantes (lutte contre les radicaux libres qui dégradent les cellules).
Demandez du soutien à vos proches. L’entourage et les encouragements font du bien au moral. Arrêter seul.e quand on vit avec un.e fumeur, ce n’est pas simple. Aussi arrêter à deux peut être plus motivant.
N’hésitez pas à vous faire accompagner par un tabacologue en appelant le numéro 39 89. Ce service est entièrement gratuit !
Questions sur l’arrêt du tabac : réponses de Dr Délia Cozzolino médecin généraliste-addictologue à Paris
Quelles sont les erreurs que vous rencontrez souvent chez vos patients en sevrage tabagique ?
Depuis 20 ans, j’accompagne des patients en sevrage tabagique, j’entends les mêmes erreurs ou fausses croyances.
Les femmes enceintes peuvent-elles utiliser des patchs ? Cette recommandation est majeure, 20% des femmes enceintes fument pendant toute leur grossesse. Le tabagisme est la première cause de prématurité en France et dans les pays développés. Les substituts nicotiniques sous formes de patchs ou formes orales (gommes et pastilles) doivent être utilisés pour soulager le manque et éviter la prise de poids par compensation alimentaire.
Peut-on fumer sous patch sans courir un danger imminent ? OUI ! Il est préférable de réduire son tabagisme sous patchs. Le patient dans un but de sevrage « en douceur » va réduire le nombre de cigarettes par jour. Malheureusement, inconsciemment, inhaler profondément une fumée plus toxique, c’est le phénomène appelé « compensation », il s’explique physiologiquement. Les récepteurs intra-cérébraux à la nicotine, n’étant pas saturés lors de la réduction, le fumeur s’adapte pour soulager son besoin de nicotine. Au contraire sous patch, la nicotine délivrée sature les récepteurs, le fumeur ancré dans ses habitudes fume, mais dès les premières bouffées, il est blasé voire écœuré et ne ressent pas le même plaisir.
En conclusion, réduire sa consommation de tabac en étant avec un patch est préférable pour sa santé, c’est une étape préparatoire avant de s’en libérer totalement. Concernant la femme enceinte fumeuse, contrainte à l’arrêt en urgence, l’utilisation de patchs est indispensable pour éviter la toxicité du phénomène de compensation.
J’ai très envie de fumer. Qu’est-ce que je fais ?
Le tabac est classé comme une drogue dite « dure », le geste est ancré dans le quotidien, on fume par habitudes, pour gérées les émotions positives les frustrations. On parle de dépendance comportementale. Les envies sont brèves et intenses, appelées pulsions. Les gérer, implique, d’y être préparés et d’avoir réfléchis à ce qui les déclenchent. Il ne faut jamais se laisser envahir par une envie, il faut bouger, sortir prendre l’air, occuper son esprit et son corps par un réponse mentale et physique, en cherchant à détourner l’attention et à se détendre.
Les envies sont fréquentes et intenses au début du sevrage, elles s’estompent après quelques jours. Pour s’y préparer, rédiger un mémo d’actions courtes (- de 10 minutes), et agréables, adaptées aux moments de la journée. Ses envies sont différentes de la nostalgie d’un moment agréable qui fait rechuter le patient sevré quelques mois ou des années après, « juste une… ». Arrêter de fumer est un apprentissage comparable à se rendre dans un pays agréable pour y vivre où il faut apprendre la langue et les habitudes pour cela la motivation est essentielle.
Comment rester motivé.e et ne pas reprendre la cigarette en pleine pandémie du COVID ?
La période inédite du COVID est comparable au traumatisme de la vie, elle est à l’origine de troubles anxieux et de dépression. Les patients sevrés du tabac, comme de l’alcool, depuis quelques mois, sont encore dans la gestion du sevrage des envies et de la nostalgie. La lutte est d’autant plus difficile que le sevrage est récent et que les troubles anxio-dépressifs ne sont pas pris en charge. Je précise ici le lien spécifique entre le tabac et l’alcool, 2 addictions comparables, qui fonctionnent ensembles et cohabitent trop souvent. Il est urgent de consulter et de se faire aider dans les périodes émotionnellement chargées et de ne pas hésiter à réutiliser des substituts nicotiniques rapidement et à doses efficaces.